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UNITYHXC.COM | Interview with Kickback



  KICKBACK | France
Kickback
Interview done by Vincent Lavigne

De quoi peut-on rapprocher Kickback ? Est-il seulement possible de faire ? Y'a t-il quelque chose à quoi Kickback adhère ? Adhérer ? Peut-être mais à quoi ? A ce consensus pâteux et informe que certains nomment culture ? A cet idéal de mollusques, pour reprendre les mots de Bertrand Leclair, qui veut que l'on s'attache à son époque et à ses mutations ? Non, certainement pas. Kickback n'adhère pas à ça. Kickback n'adhère tout simplement pas du tout. Kickback n'adhère à rien d'autre qu'à sa propre identité : frontale, directe, impulsive et violente. C'est en cela que l'univers de Kickback demeure encore et toujours d'actualité. Parce qu'il reste à part dans le paysage musical français, parce qu'il en dégomme les règles de bienséance, les conventions hypocrites et étriquées, Kickback interpelle, dérange et divise. Kickback n'en est pas moins l'antre d'obsessions humaines où s'allient dans une rage urbaine l'énergie du New-York hardcore, une littérature puissante et nihiliste ainsi qu'un hédonisme criminel démesuré. Kickback n'adhère pas c'est vrai, mais Kickback interroge. Et aux nombreuses questions que peut susciter le groupe et sa démarche, ne vient souvent pour toute réponse qu'un silence frustrant. Kickback n'adhère pas, c'est un fait. Pourtant le quatuor parisien ne reste pas hermétique à toute discussion, comme ce fut le cas lors de notre rencontre pendant le Fury Fest de Nantes. L'occasion de rencontrer Stephen Bessac, fondateur et chanteur du groupe, et de lui soumettre nos nombreuses questions auxquelles il s'est pourtant collé.

Kickback avait presque disparu du paysage musical ces dernières années. On évoquait même le split du groupe. Besoin de faire un break ? Motivation moindre ?

Il n'y a jamais eu aucun split de prévu. En fait c'était juste qu'à un moment il y a eu une période de battement où il ne se passait pas grand-chose. Donc effectivement chacun s'est un peu mis à faire ses trucs de son coté. Le bassiste et le guitariste ont montés un studio ProTools où ils bossaient sur des trucs électroniques. Ce qui se passe c'est quand tu fais de la musique depuis 10 ans et que même si le but c'est de faire de la musique pour toi t'as quand même envie de jouer, de faire des concerts et bon à un moment ou un autre il peut y avoir une petite démotivation. Mais la en l'occurrence c'est juste un petit trou et dans la tête de tout le monde c'était plus une pause qu'autre chose. Chacun de son coté on a fait des choses tout en se disant qu'on allait s'y remettre. Avec Kickback on a toujours la volonté de pousser le truc jusqu'au bout. On arrêtera pas tant qu'on ce sera pas dit qu'on est arrivé au bout de ce qu'on avait envie de faire. C'est pareil pour l'idéologie de Kickback. Quand moi je fais les pochettes, les paroles c'est moi qui suis mon propre juge. Et tant que ça correspondra pas avec l'idée que j'ai en tête ça n'ira pas et on n'arrêtera pas tant qu'on aura pas atteint le but qu'on s'est donné qui est au moins de pousser le truc jusqu'au maximum. Ce qui n'est pas encore le cas malgré notre longévité.

Pourquoi revenir directement à la scène après ce long silence, pourquoi ne pas enregistrer un nouvel album (attendu depuis longtemps) et tourner ensuite ? Un besoin de se remettre dans l'ambiance ?

Non pas vraiment. La scène c'est quelque chose dont on a besoin, on a besoin de jouer, de faire des concerts. Si l'album s'est pas fait c'est simplement parce qu'on venait de finir le contrat avec Hostile Records et on s'est retrouvé à se demander ce qu'on allait faire. Donc on s'est mis à composer…Avec Kickback on a une manière de fonctionner qui est un peu spéciale. En même temps ça nous joue des tours parce qu'on a tous un besoin d'être tout le temps dans l'actualité. Moi ce que j'aimerais si je pouvais ce serait de sortir des 45 tours, faire des maxi…enfin être beaucoup plus actif. Après y'a plein de trucs de la vie quotidienne qui rentrent en jeu, on est des grosses feignasses aussi…y'a plein de choses qui font que le processus chez nous met beaucoup de temps. Mais c'est jamais calculé, c'est pas un choix…ça se fait comme ça vient avec des éléments extérieurs qui viennent s'y greffer. Peut-être qu'on devrait justement plus se poser, plus réfléchir aux choses…

Evolution musicale depuis vos début jusqu'au 150 passions….

Moi j'ai toujours essayé de composer en fonction des musiciens avec lesquels je me trouvais. J'avais toujours une idée assez précise de ce que j'avais envie de faire qui était liée aux influences que j'avais eu au fil du temps. Après y'a la musique que t'as envie de faire et celle que tu fais. Surtout quand tu vis dans un pays où les mecs mettent un temps énorme à assimiler les choses…moi j'ai un besoin de mettre des choses en place, ma rage, des obsessions, de l'agression que j'ai et que je place dans la musique. J'ai choisi un certain style de musique et après tu composes avec. C'est clair qu'au départ l'influence première c'était plus le New-York hardcore mais après j'ai vite dévié sur d'autres choses et les gens qui étaient dans mon groupe ne suivaient pas forcément. D'ailleurs on a eu pas mal de changements de line-up et il ne reste que moi de la formation originelle.
Depuis Forever War par exemple, Irvin Oziel est passé à la guitare (ndr. alors qu'il était batteur à cette époque), on a intégré Simon Doucet (ndr. Ex-Bushmen, ex-Shaggy Hound, ex-Time Bomb On Legs)….Après je pense aussi qu'on est tous différents au niveau des influences musicales mais on se retrouve pour un truc bien précis. On sait pourquoi on est là et y'a une idée très précise de ce qu'on veut faire avec Kickback et aussi ce qu'on ne veut pas faire, sans mettre forcément une étiquette musicale. On peut se lâcher sur pleins de trucs, Kickback doit quand même rester dans une certaine ligne directrice qui est assez instinctive. De fait l'évolution musicale s'est aussi faite avec les gens qui s'y sont greffés. Et y'aura encore une nouvelle évolution sur le prochain album.

Kickback est souvent associé à la scène hardcore new-yorkaise et souvent défini comme un groupe « hardcore metal ». Le terme n'était pas totalement faux à l'époque de Forever war, mais en ayant choisi ED Rose (Coalesce, Get Up Kids) pour produire les "150 passions meurtrières", il me semble que Kickback a énormément gagné en personnalité et se démarque de tout étiquetage réducteur. Beaucoup de vos fans n'ont pas compris cette démarche, cette recherche d'un son nouveau, plus cru… A l'écoute de vos nouveau morceaux, on est agréablement surpris.
Le prochain album s'annonce très varié avec notamment des titres dans lesquels il m'a semblé déceler quelques influences diverses, Black Sabbath et Leeway par exemple. L'impression est elle juste ?


Oui ça va être super différent. Mais déjà New-York hardcore ça ne veut pas dire grand-chose. C'est vrai que dans le N-Y hardcore y'a un certain style mais quand tu prends des groupes comme Darkside, Neglect, Madball, c'est toujours du N-Y hardcore mais ça n'a rien à voir. Après je pense que ce qui nous plaisait dans ce style c'est qu'il y avait un coté groove, même s'il y avait des influences plus métal pour certains ou plus hip-hop pour d'autres. Y'avait un style qui n'était pas réducteur du tout. Chaque groupe avait vraiment sa personnalité, son identité, mais ça c'était vraiment tout au début. Après les influences ont énormément variées. Là tu me parles de Black Sabbath. Pour moi c'est eux qui ont tout inventés, au niveau des beats et tout. Moi j'ai des vidéos de Killing Time faisant des reprises de War Pigs…Black Sabbath c'est un groupe qui est incontournable, qu'il faut connaître…Après il t'influence pour ou moins consciemment. Je pense pas que le nouvel album comprenne énormément l'influence Black Sabbath ou Leeway…Disons qu'il y a un coté rock qui avait été un peu négligé chez Kickback et qui va plus apparaître dans le prochain. Et quand je dis rock c'est tellement large…je pourrais pas te dire. On aura encore et toujours notre groove…C'est le truc qui manque à pas mal de groupes en Europe. Pour autant on se comprend ce sera pas du sous-Beastie Boys ou des trucs néo-métal. Ce sera pas hip-hop non plus. J'en écoute plus depuis une plombe déjà…maintenant y'a plus grand-chose sauf des vieux trucs comme Ghetto Boys, le premier Wu Tang Clan, les vieux Mobb Deep….

Vous êtes à la recherche d'une maison de disque. On évoquait un moment le nom de EMI et l'envie de travailler peut-être avec Steve Albini ou Billy Anderson. Qu'en est t-il ?

Pour le moment on a toujours pas de label et on cherche toujours. EMI semble avoir été intéressé mais pour le moment rien n'est fait donc on est toujours là, avec un album de composé, à attendre de trouver une maison de disques. Concernant les producteurs que tu cites, c'est vrai qu'on aimerait bien faire quelque chose avec ces gars-la, même si pour le moment il nous faut d'abord une maison de disques prête à nous payer la prod.

Je fais partie (en l'occurrence ici Dragz) de ceux qui pense qu'une production à la ED Rose est ce qui sied le mieux à Kickback, celle de Jamie Locke est trop propre pour un groupe tel que le votre. Une grosse majorité des fans de Kickback pense le contraire…De quel coté penches tu ?

Avant tout je pense qu'on est détesté par beaucoup et on est aimé par d'autres et c'est peut-être bizarre ce que je vais dire mais la plupart des gens qui détestent Kickback ils le font pour les mauvaises raisons et pareil pour ceux qui aiment beaucoup Kickback. Par exemple, y'a plein de gens qui me disent "Kickback j'aime pas". Alors j'leur dis Ok mais je leur demande pourquoi et c'est toujours à coté de la plaque même pour ceux qui aiment. Y'en a très peu qui captent réellement notre délire, ce qui fait qu'on est aussi bien incompris par les uns que par les autres. Pour en revenir à la prod, on s'est rendu compte à force de jouer live qu'on se lâche énormément. Quand je monte sur scène et qu'on fait un set de 40 min j'ai l'impression qu'il en dure deux. Chez Kickback en live ça explose vraiment, c'est certainement moins posé que certains groupes de N-Y hardcore, ce qui fait qu'on s'est rendu compte qu'on a un son super chaotique en live. C'est clair qu'une production ala Jamie Locke elle te saute en pleine figure, y'a un gros son mais c'est pas ça qu'il nous fallait. Même au niveau de la voix, moi quand je gueule ça part un peu dans tous les sens et avec Jamie Locke tu prends le casque et ça reste super carré. Alors qu'avec Ed Rose, on voulait un son plus crade, plus sale….Et quand je dis sale, Slayer c'est sale pour moi. Donc quand on est arrivé il m'a demandé comment je tenais mon micro sur scène, comment je pose ma main dessus et à partir de là on a enregistré comme ça. Et maintenant j'ai même plus envie de rentrer dans un délire avec un casque et tout le bordel. Ptet qu'à l'époque de Cornered, Jamie Locke allait bien mais déjà pour Forever War on aurait pu passer à autre chose. Sur le 6 titres on voulait vraiment rendre cet esprit live qu'on a.

Kickback est un peu un groupe mythique, qui exerce une fascination curieuse produite, je pense, de par une apologie à la violence mélangée à un manière d'être, une attitude, en somme une sorte de jeu malsain et complaisant, propre à satisfaire la frange virile du hardcore et à nourrir grassement les critiques de vos détracteurs. Finalement qu'est ce qui a vraiment permis au groupe de se construire cette image ?
L'énergie virile desservie au hardcoreux ? Les scandales à répétitions ou encore le silence latent de Kickback qui ne dissipe finalement aucune interrogation ?


Et encore la frange virile du hardcore ! Pour moi dans un concert de hardcore y'a aucune violence. Ca fait des années que j'en fais et y'a jamais aucun danger. Je me sens plus en danger dans une boite de beaufs en banlieue ou à un concert de Johnny…Mais pour en revenir à ta question je pourrais te dire "Ouais c'est tout calculé…"…Vous avez jamais lu "Le Manifeste du Terroriste Culturel" C'est un groupe d'indus qui faisait ça et il parle beaucoup de la confusion. Moi c'est un concept qui me plait beaucoup, la confusion comme arme…c'est assez intéressant. Mais en même temps y'a une grosse dose qui se fait à l'instinct, selon l'ambiance, selon le public…après les gens vont le prendre d'une certaine manière. Mais chez nous y'a vraiment rien de calculé. Sinon je pense qu'avec Kickback on en serait pas à ce stade. On a plus de dix ans d'existence, un potentiel…et y'a plein de choses qu'on a pas fait. Si c'était calculé ce serait déjà super-suicidaire vu que ça nous a pas réussi…notre image sulfureuse nous dessert plutôt qu'autre chose. Je crois que dans Kickback y'a d'abord une franchise et c'est ça qui plait ou qui déplait, c'est pour ça qu'avec nous ça passe ou ça casse. Après si cette franchise tu veux pas te la prendre dans la gueule c'est autre chose mais on reste franc.

Dans les "150 passions" il y a beaucoup de références à Sade. Qu'est ce qui t'as marqué chez lui ?

Sade c'est énorme, quand je l'ai découvert ça été quelque chose d'énorme. J'ai découvert Sade assez tard en fait…disons que j'ai toujours eu des goûts et des obsessions sur pas mal de sujets et que j'avais jamais mis dans Kickback. Je me suis toujours intéressé à des trucs super extrêmes depuis que je suis tout jeune…quand j'étais plus jeune j'ai commencé avec les films d'horreur…j'métais même fait une fausse carte pour voir les films de moins de 16 ans. D'abord voir les films les plus extrêmes et ainsi de suite…Enfin j'avais vraiment une démarche de rechercher les trucs vraiment extrêmes autant dans le cul que dans d'autres choses. Donc Sade forcément quand tu es un mec super curieux et que tu t'intéresses autant à la littérature qu'à l'art t'es obligé de le rencontrer un jour ou l'autre. Moi j'suis un auto-didacte, j'ai gratté à droite à gauche, à rechercher et donc j'ai vraiment eu des influences super diverses, du cinéma à la musique électronique, des serial killer…et finalement tout ça je ne le mettais pas dans Kickback. Si tu regardes bien, tu vois qu'il a déjà des traces sur "Cornered". Ok tu peut le prendre comme un truc de N-Y hardcore…mais si tu regardes bien, rien qu'au niveau du choix des samples, y'avait déjà un ptit gout de ce que je kiffait.
J'ai commencé à écouter Integrity, des groupes comme ça. Déjà au début de Kickback j'avais envie de passer à un truc supérieur. Moi je voulais faire du death-core. J'ai toujours aimé les trucs super sombre. Si t'écoutes le 45 tours de Kickback je trouve qu'il est déjà beaucoup plus sombre que "Cornered"…y'avait des samples d'un mass murders de Brooklyn …et j'avais super envie d'évoluer la dedans et ça bien avant qu'il y ait le H-8000 (ndr. Congress, Deformity, Liar…).
Kickback , first demo Franchement moi je me suis senti super frustré quand ces groupes sont arrivés genre Congress qui reprenait le truc métal et les influences ala Integrity. Moi c'est ce que j'avais envie depuis longtemps mais que les mecs qui étaient dans le groupe à la base ne captaient pas. C'était Killling Time et d'autres et on s'arrête la. J'me rappelle quand on a fait la première tournée avec Sick of it All, j'avais reçu "Those Who Fear Tomorrow" d'Integrity avec lequel je m'étais pris une claque énorme. Déjà à l'époque ils avaient fait un split 7 inch avec Mayday qui s'appelait "Les 120 Journées de Sodome" et ils faisaient des hommages à Sade. Disons que j'avais pleins d'influences super diverses et qu'au bout du compte tout était cohérent et j'avais envie de mettre ça dans la musique. Le problème c'est qu'au début avec Kickback je me sentais un peu tout seul la dedans donc je le mettais à petite dose. Après les choses ont changées au niveau du groupe, "Forever War" c'était encore autre chose mais j'avais déjà mis plus d'influences personnelles au niveau de l'aspect philosophique avec des citations de Nietzsche, de William Blake…donc les choses se fixaient un peu plus…au final j'avais vraiment envie de faire un CD qui va vraiment être basé sur des obsessions que j'ai. Y'a des obsessions récurrentes, comme la mort, le sexe aussi...c'était un peu le concept du CD et qui avec Sade sont canalisées.

Je pense que tu as bien du voir SALO de Pasolini. Et finalement qu'est-ce que tu en penses ?

Moi j'adore, je trouve ça vraiment fort, même si pour beaucoup il a été assez critiqué aussi et ça déjà par rapport à l'œuvre de Sade elle-même.
Rien que le fait de l'avoir mis dans un contexte politique etc…Mais ça je le prends à part. Je le prends plus comme une œuvre pavé qui te happe.
Déjà tu peux le prendre à un premier degré très simple…Rien qu'en voyant avec Pasolini…le fait de prendre des jeunes de leur faire faire ce qu'ils font au niveau du travail d'acteur, c'est déjà très très fort….Après l'œuvre en elle-même y'a rien à en redire.
C'est pour ça que je prends le travail de Pasolini à part de celui de Sade.

Ce qui explique après aussi beaucoup de choses, notamment cet forme de boucle avec l'intérêt que tu portes à tous ces gens. Je pense à Gaspar Noé (Carne, Seul Contre Tous, Irréversible) puisque tu as repris sur "Les 150 Passions meurtrières" un passage qui est sur Carne (ndr : "Il y a bien deux choses que je ne pourrai pas lui refuser. La première c'est un coup de trique, la deuxième c'est un coup de poing").
Gaspar Noé qui lui-même est fan de Pasolini puisqu'il en commente la réalisation sur le DVD de SALO. Et finalement de Sade aussi puisqu'on en revient à la fois à l'auteur et à ce que tu as entrepris sur les "150 passions"…
D'une certaine manière, peut on rapprocher cette démarche extrême de celle d'un Gaspar Noé qui fait à la fois de ses films des systèmes de violence en rupture avec toute morale, sans que l'on sache pour autant où est la frontière entre ce qu'il fait et ce qu'il pense…


Ouais mais je pense pas qu'il y ait besoin de savoir pourquoi. Moi je connais très bien Gaspar, c'est un ami à moi. En fait j'suis tombé sur "Carne" complètement par hasard, et c'est vraiment le genre d'image qui te happe du premier coup. Je me rappelle très bien, j'étais chez un ami, il zappait et on est tombé sur ce film et ça m'a pris direct. J'vais te passer les détails mais y'a quelqu'un qui est très proche de moi et qui connaît très bien Gaspar, qui travaille avec lui en tant qu'assistant et qui nous a présentés. On a sympathisés et maintenant c'est quelqu'un que je vois très régulièrement. D'ailleurs si tout s'était bien passé on aurait du faire un clip ensemble des "150 passions meurtrières". Je lui avait demandé de faire le clip au début mais il m'avait dit non qu'il pouvait pas le faire. Et un jour on était chez moi on était en train de regarder des vidéos et j'lui montrais des mecs genre Necro ou R.A The Rugged Man, qui faisaient des clips avec rien…fait en vidéo super hardcore. Genre Necro y'a son oncle qui est accro au crack et il l'a filmé dans une chambre d'hôtel entrain de se shooter et de prendre du crack…il a fait une reprise d'un tube de LL Cool J qui s'appelle "I Need Love" et qu'il a changé par "I Need Drugs" . J'pense que ce qui nous as fait bien nous entendre avec Gaspar c'est qu'on a une idée du cinéma assez proche…on aime les trucs qui sont réels. Et ce que j'ai aimé chez Gaspar c'est qu'il utilise très très peu d'acteurs. Il y a cette recherche de la réalité…Moi j'suis autant fan de streap-tease que de films de culs amateur où tu as vraiment un truc de vérité. Tu regardes ça tu vois quelque chose qui va au delà du cul. Ce sont des trucs super réels. Et tout les deux on kiffe vraiment sur ça et il m'a dit " Mais s'il faut faire un clip pour Kickback il faut faire ça". Et finalement il était Ok pour le faire…moi j'suis parti voir les gens de la maison de disques qui eux n'ont jamais voulus mettre de l'argent sur un clip Kickback et qui savait très bien que ça passerait nulle part. Je leur ai amené le nom Gaspar Noé, ils ont kiffés et ont dit "Ok on va le produire"…mais "Irréversible" est arrivé d'un coup, il à du se mettre en charge du projet et finalement ça ne s'est pas fait (ndr Gaspar Noé et Marylin Manson ont quand à eux le projet de réaliser un clip X). Mais c'est un réalisateur que j'adore. Déjà avant tout c'est quelqu'un que j'admire pour ses œuvres….
Mais pour revenir à ta question je crois pas que ce soit une histoire de cautionner ou pas.
Je crois qu'avant tout il a une culture cinématographique qui est proche de la mienne et sans être réducteur sa démarche est proche de Kickback sur au moins un point c'est que lui il avait envie de voir un certain genre de films qui ne se faisaient pas en France, et c'est ce qu'il a fait, et moi avec Kickback j'avais envie de voir un certain style de musique qui ne se faisait pas en France et je l'ai fait pour ça. Si j'ai créée Kickback c'est parce que tout ce qui se passait autour de moi ne m'intéressait pas et j'ai eu envie de faire un groupe que moi j'ai envie d'écouter. Et Gaspar Noé il voulait aussi faire des trucs comme Taxi Driver (de Martin Scorsese), Deliverance (de John Boorman) qu'on avait pas en France…c'est une partie de sa culture et il avait envie de faire ce genre de films qui font que tu peut pas rester indifférent. Kickback c'est pareil.

D'ailleurs pour en revenir justement à tes débuts dans Kickback, quel était l'état de la scène hardcore à ses débuts aux alentours de 1990 en France ?

On a commencé Kickback en 90-91, y'avait une scène hardcore qui était minime…D'ailleurs quand t'avais les cheveux rasé t'étais un skin ou un facho, le N-Y hardcore était super mal vu en France, les straight-edge ça n'existait pas ou le peu de straight-edge qu'il y avait c'était des gars qui écoutaient tout ce qui était de chez Dischord (Minor Threat, Ignition, Youth Bridage) ou dans la région de Washington DC…Moi je me rappelle de certains mecs qui étaient influents dans la scène de l'époque et refusaient de me serrer la main parce que j'étais straight-edge à ce moment là et parce que j'avais un X sur la main. Le nombre de fois où je me suis fait embrouiller parce que j'avais le crane rasé, un T-shirt Youth of Today et un treillis, bref le look sur-courant maintenant…Ben à l'époque c'était pas ça. Le hardcore à Paris était pas bien vu du tout. Rien que la danse où tout le monde fait ses moulinets etc.…Moi à chaque concert je m'embrouillais avec des mecs. Pour moi le N-Y hardcore c'était aussi lié à une façon de danser, j'allais à chaque concert, t'avais un public de 250 mecs…des vieux punks, des gars en short qui écoutaient Hard-Ons, des rockers…t'avait tout ce que tu voulais mais pas un seul mec dans le délire. Et quand t'as un ptit maigrichon, rasé qui arrive au milieu et qui commence à mettre des coups de coudes, des coups de pieds, des coups de poings, ils se demandaient tous : "Mais qu'est ce qu'il a ?!". Et à chaque concert on dansait, mais c'était une lutte et on était super mal vus. Et quand t'as un son super lourd, des compos très lourdes avec des gars aux cranes rasé t'étais vraiment très mal vu. Mais en même temps c'est ça qui me plaisait parce qu'on était les seuls à faire ce type de musique et j'avais vraiment du mépris pour toute la pseudo-scène hardcore qu'il y avait. Nos premiers concerts on les à fait c'était avec Les Gnomes, DSB…je leur jette pas la pierre à eux…mais la scène hardcore en France c'était pas ce que j'écoutais. Je pense que le fait que personne n'aime et que les gens soient choqués quand on joue, ça me plaisait aussi d'une certaine manière. Y'avait cette démarche de ne pas aller dans le sens du poil et de provoquer, ce qui est encore présent aujourd'hui mais qu'à l'époque je ne contrôlais pas vraiment mais qui me faisais plaisir.

Question ciné toujours puisque Kickback est crédité, à ma connaissance, dans deux films français: Le Poulpe (de Guillaume Nicloux) et La vie rêvée des Anges (d'Eric Zonka)…où il y a une scène de concert. Comment as-tu eu ces opportunités ?

Pour "La vie rêvée des Anges" en fait c'est pas nous qui jouons, comme pour "Le Poulpe" c'est juste de manière audio. Mais tout ça c'était purement lucratif. Vus qu'on est signé sur une maison d'édition à savoir Delabel Edition, on est dans un catalogue d'artiste et quand t'as par exemple un réalisateur qui recherche un certain type de musique, alors il utilise tel ou tel musique d'artiste. C'est pas des choses qu'on gère mais c'est pas non plus dans notre intérêt de refuser ce genre de choses. On est aussi sur un autre film qui s'appelle "La Mort du Chinois" (de Jean-Louis Benoît avec José Garcia) et la pareil c'est le réalisateur qui voulait Kickback. Il voulait qu'on joue dans un bar et on l'a fait…C'est clair que je préférerais que Gaspar Noé me demande de faire un truc dans un de ses films mais après ça nous est égal.

Pour revenir à ta période SXE. Qu'est ce qui avait motivé cette démarche ?

Bon déjà je ne le suis pas resté longtemps…tu vois avec Kickback y'a un thème récurrent…c'est la force. Un peu un coté de surmonter ses faiblesses ou de les accepter…et pendant un très court moment ça a été quelque chose qui se rapprochait de cette force…mais c'est ridicule. T'as pas besoin de te mettre d'étiquettes…C'est trop réducteur…y'a trop de choses à essayer pour se réduire à ce genre de principes…ça en devient liberticide. Et moi je pense que l'excès est bon.

Revenons en maintenant à ton rapport à la scène new-yorkaise. S'approprier un style, en assimiler les codes, bénéficier une production à l'américaine (cf. Jamie Locke : Cro-Mags, Madball, Sick of it all, VOD), tourner avec bon nombre de groupes new-yorkais (SOIA, Madball, Agnostic Front, 25 ta life, Crisis), tu as aussi des connections très étroites avec cette scène, tu étais présent au CBGB de N-Y en hommage à Frank Collins, et Kickback bénéficie même d'une reconnaissance de cette scène new-yorkaise. Jusqu'où va cette relation que toi ou Kickback nourrissez avec New-York ?

A la base j'ai jamais aimé être passif. Quand j'ai commencé à écouter ce genre de musique, j'ai eu envie de monter un groupe, de monter un label (ndr. Hardway avec lequel il y eu des sorties comme All Out War, Confusion, Bulldoze), et je suis super curieux et j'ai envie de gratter à tous les niveaux. Par exemple si je découvre un groupe ou un auteur, j'vais essayer de savoir quelles sont ses influences, quelle est sa démarche. Quand j'ai découvert le New-York hardcore j'ai voulu en savoir plus, j'voulais aller voir plus loin que les pochettes et les paroles. Donc je me suis dit les gars faut que je les rencontre pour voir ce qu'ils ont dans le ventre. Et donc dès que j'ai pu je suis parti à New York, j'suis allé les voir en concerts et causer avec eux. Après j'ai fait mon label et j'ai branché un groupe de Long Island qui s'appelait Disciplinary Action pour qu'il fasse des nouveaux morceaux que j'aurai sorti sur mon label mais qui à l'époque n'existait pas encore…Alors je lui ai téléphoné et sur le coup il m'a pas cru, il pensais pas qu'un français de Paris puisse s'intéresser à ça et finalement il m'a dit oui. J'dis pas ça pour me la péter, mais quand j'allais à N-Y y'avait pas d'européens ou alors très peu qui ne se mêlaient pas à la faune. Moi ma démarche c'étais je vais la bas, je veux rencontrer les mecs, je veux traîner avec eux. Donc après avec Pascal notre bassiste on a logé chez les gars de Long Island puis chez les gars de Confusion à Brooklyn. Il s'est avéré que dans sa baraque y'avait tous les mecs de Brooklyn qui passait dire bonjour. C'est comme ça que j'ai vu les mecs de Merauder et on a bien sympathisés (ndr. Mike MacIvor, bassiste chez Merauder ayant intégré depuis Candiria)….Avec ceux de Long Island j'ai rencontré les gars de Neglect…et ainsi de suite…Pour moi aller à New-York c'était la folie et j'voulais en profiter un maximum et pas pour aller en vacances ou faire mon shopping. Et puis voilà quoi. Après c'est devenu un truc humain, des rencontres avec des gens….Je bossais à Paris, j'mettais de la thune de coté puis je repartais pour N-Y pendant trois mois à traîner, à voir les concerts, les gens...

On connaît aussi ton intérêt pour le rap. Avec une participation de Profecy d'Assassins sur les 150 passions et une autre avec Pit Baccardi sur la compil Attentat Sonore. Y'a t-il d'autres rappeurs avec qui tu aimerait faire un morceau ?

En fait y'a rien eu du tout. C'est eux qui avaient besoin d'un mec pour faire une partie guitare, et au lieu de prendre un guitariste quelconque ils ont demandés à Irvin. Et Irvin à fait de la guitare point final. Et encore le morceau à été super sous-mixé. Ils l'ont aseptisé. Ils avaient juste besoin d'une guitare et voilà. C'est vraiment un truc de studio, ils auraient pu prendre n'importe quel gars…et comme Pit Bacardi est chez Hostile, Kickback était chez Hostile, ils ont voulu faire ça.

Et par rapport au featuring de Profecy sur les "150 passions…" ?

Ca c'était une envie qu'on avait depuis longtemps. Profecy c'est un pote à nous…et c'est vrai qu'à un moment la maison de disque nous a vraiment poussé pour faire un truc hip-hop/hardcore. C'était un truc de maison de disques purement commercial. Mais pour ce genre de truc il faut avoir des gimmicks et nous on a pas vraiment ça…c'était à l'époque où ils y croyaient encore et donc ils ont un peu poussés mais on ne l'a jamais fait. On a fait quelques répètes avec Arsenic qui se sont pas trop mal passées…On avait repris "Against the World" de Cornered et on avait fait un ptit passage où il pouvait se placer. C'était drôle, on se connaissait comme ça, on se croisait plus vite fait dans les bureaux d'Hostile…Le truc c'est qu'on a jamais changé notre style, on a fait un truc hardcore et y'a des gars qui ont posé leur flow hip-hop. C'est resté Kickback hardcore, super venère avec le flow rap en plus…un truc anti-commercial…et donc ils ont abandonnés l'idée mais que nous on a gardé pour le faire avec Profecy. C'est un gars qui taggue et que je connais depuis des années. J'écoutais ses textes et à ce moment là il avait des texte super vénère. Il était influencé par des gars comme Necro, c'est un gars de New-York, R.A The Rugged Man…ce sont des rappeurs blancs qui sont à l'opposée de l'image clinquante du rappeur avec de la thune, des filles…c'est des paroles super dépressives…Necro lui il est influencé super-gore où il ne parle que de meurtres et de choses comme ça…C'est une sorte de gars qui rappe pieds nus, genre un crusty du hip-hop qui cite GGAlin mais qui est respecté par plein de gars comme Biggie Small, Redman….c'est un mec qui a un pur flow, qui fait des paroles sur : "J'ai pas de thunes, j'suis crado, j'baise pas de meufs parce que je suis un loser". C'était du hip-hop mais avec un coté super punk. Donc avec Profecy on s'est dit que si on fait un truc on le fait dans cet esprit la. En plus le concept du 6 titres était bien extrême donc on s'est dit si Profecy rappe, on le fera là-dessus.

Etant toi même impliqué dans la scène hardcore à la fois au sein de Kickback et de quelques sorties sur le label Hardway (Confusion, End Of One, Bulldoze…), quel regard portes sur cette scène qui s'est éclatée peu à peu ces dix dernières années mais semble se renouveler de manière plus extrême musicalement (Converge, DEP, Coalesce, Botch) ? Est-ce que tu restes sur les vieux albums ou t'intéresses tu aussi à tout ce qui sort actuellement ?

Ah non moi j'aime tout vraiment. Pour moi à l'époque All Out War c'était déjà super agressif…à l'époque où moi j'ai commencé Kickback, j'écoutais Morbid Angel, Napalm Death, Carcass…j'ai toujours été un fan de métal et de death-metal. Raining Blood de Slayer ça reste pour moi un de mes albums préférés. Donc la musique extrême j'ai toujours kiffé. Mais pour moi Dillinger Escape Plan où les choses comme ça c'est pas de la musique extrême…j'accroche pas. Converge j'aime bien. C'est pour ça que j'étais toujours un peu frustré avec Kickback, parce qu'il y avait un décalage entre ce que j'aimais et ce que je faisais. Moi j'aime tout ce qui est extrême, que ce soit dans le grind, le metal…moi j'aime quand il y a de la rage…

D'ailleurs tu portes un t-shirt de Pig Destroyer… (ndr : le groupe de Scott Hull, producteur de Godflesh, Genocide Superstars, Regurgitate, guitariste dans Agoraphobic Nosebleed et ex-Anal Cunt)

Ouais Pig Destroyer j'adore. Je trouve ça vraiment génial…Ce coté grind et les paroles super psychotiques…des sortes de chansons d'amour ultra-gore…y'a un truc super décalé qui est énorme chez eux. Agoraphobic Nosebleed par contre j'aime moins.

Tu parlais aussi de Gehenna ou de Catharsis…

Ouais Gehenna c'est un de mes groupes préfères. Catharsis j'aime bien même si c'est un peu trop politique. J'adorais les premiers Catharsis parce qu'il y avait vraiment une âme, une énergie mais après c'est parti dans des délires un peu trop politiques. Pour moi dès que tu commences à t'associer à un mouvement, un groupe ça perd de son identité. Et Gehenna ils ont vraiment ce coté "Fuck Life" que j'adore.

J'avais aussi vu dans un vieux RAGE une interview à l'époque de Forever War dans laquelle tu disais que tu étais fan d'indus, d'où le morceau "Nightstalker".

Oui la pareil c'étais aussi une collaboration. Mais par rapport à ça moi j'écoute beaucoup plus des trucs noise ou power-électronique comme Whitehouse, Taint, Macronympha, des trucs vraiment violent. Alors que la c'était plus un truc death-industriel genre Brighter Death Now ou ce que tu trouves sur le label Cold Meat Industry. Mais tu vois la on parles de musiques extrêmes…on parlait de Pig Destroyer…mais moi il faut avant tout que ça ait une âme. N'importe qui peut te faire le groupe le plus extrême de la terre mais si y'a rien derrière ça m'est complètement égal. C'est pour ça que si je parles en mal de la scène hardcore de maintenant c'est qu'il n'y a aucune cohérence…Genre les groupes qui vont se prendre des noms, se mettre des images pas possibles de gangsters…Faut arrêter ! Je préfère largement un mec qui va faire un groupe d'émo et qui va pleurer pendant quinze chansons sur sa meuf qui l'a quitté, même si le gars t'as envie de lui foutre des claques et de lui dire de se bouger, ce sera plus vrai que le gars qui, parce que son grand-père est italien ou je sais pas quoi, va sortir tout le design du mafieux de base. Moi j'aime des individus qui font des trucs intéressant et ça dans n'importe quel domaine du hardcore au grind en passant par le blues, la country…qui dans le propre style ont une véritable personnalité….Et si nous-mêmes on est un peu à part c'est parce que je voulais que dans ce qu'on fait on soit à part.

Merci à Stephen ainsi qu'à Simon de Kickback



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787
  "Cornered"

Format : cd
Date : 1997-05-05
Label : Hostile records
853
  "Forever war"

Format : cd
Date : 1997-05-05
Label : Hostile records
854
  "Les 150 passions meurtri"

Format : cd
Date : 2000-05-05
Label : Hostile records


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